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Source en anglais : https://seenothing.noblogs.org/2025/10/24/struggle-for-internationalism/
Traduction française : Les Amis de la Guerre de Classe
Nous reproduisons ici un article polémique, initialement publié dans Marxist Forum en juin 2025 pendant le conflit israélo-iranien, contre divers appels et groupes campistes, défensistes et sociaux-patriotiques qui s’identifient comme « marxistes ».
GUERRE DES USA ET D’ISRAËL CONTRE L’IRAN
Défaitisme et indépendance de classe
« Dans une guerre réactionnaire, la classe révolutionnaire ne peut faire autrement que de souhaiter la défaite de son gouvernement. C’est là un axiome. Et il n’y a pour en contester la vérité que les partisans conscients ou les acolytes impuissants des sociaux-chauvins. » – V.I. Lénine
i.
Les bombardements apparemment sans raison des États-Unis et d’Israël sur l’Iran ont déclenché une vague d’agitation et de troubles au niveau international, tant dans le camp bourgeois que dans le camp prolétarien. Certaines fractions de la classe dirigeante sont inquiètes face à l’escalade, d’autres y voient une opportunité dans la réorganisation mondiale du pouvoir qui se profile, et d’autres encore tirent directement profit de l’escalade et lui confèrent une légitimité financière et morale. Néanmoins, la fraction dominante de la classe dirigeante, la bourgeoisie hégémonique américaine, représente les intérêts généraux du mouvement du capital mondial et sa tentative de pénétration au Moyen-Orient afin de le consolider et de l’intégrer davantage dans le statu quo américain de l’ordre capitaliste mondial, et elle semble très enthousiaste à l’idée d’avoir enfin atteint un point de bascule après des années d’escalade provoquée en Iran. Le récit construit est celui d’une guerre dissuasive, sinon pour empêcher l’Iran de développer une puissance militaire nucléaire, du moins pour éliminer une menace nucléaire potentiellement existante dans la région du Moyen-Orient. Ceux qui souffrent, ceux qui supportent tout le poids de la réorganisation impérialiste, de la reconstruction et des luttes intestines bourgeoises, c’est bien sûr la classe ouvrière. La crise capitaliste est ressentie par les travailleurs non seulement au cœur du Moyen-Orient, mais dans le monde entier. Les prix des marchandises et des produits de base augmentent, les salaires stagnent, la conscription militaire obligatoire est imposée et les travailleurs sont contraints de tuer et de mourir pour leur bourgeoisie, la domination militaire impérialiste se renforce dans la périphérie et le nombre de morts ne cesse d’augmenter. À première vue, il ne s’agit pour l’instant que d’une guerre entre une poignée d’États, mais les secousses provoquées par leurs marches, leurs bombes, leurs armes et leurs discours ébranlent violemment l’ensemble du monde capitaliste.
ii.
Par ailleurs, des appels sociaux-patriotiques et défensistes lancés par diverses organisations militantes et révolutionnaires, dont certaines se revendiquent du « marxisme » par principe, commencent à circuler au sein de certains secteurs du mouvement ouvrier actuellement fragmenté. Certains groupes vont même jusqu’à élaborer des excuses sophistiquées pour expliquer pourquoi les travailleurs du monde entier devraient soutenir un État plutôt qu’un autre, et ce que la classe ouvrière aurait à gagner en défendant ces vieilles foutaises de défensisme. Les travailleurs du monde entier, disent les sociaux-patriotes, doivent « prendre parti », laissant entendre que l’indépendance et l’internationalisme de la classe ouvrière ne sont pas un parti à prendre, et pire encore, que ce serait un engagement en faveur du « pacifisme » ! S’appuyant sur un « anti-impérialisme » peu reluisant, ces groupes considèrent que les guerres inter-impérialistes entre États bourgeois consistent en l’oppression d’un État par un autre, et que cette politique étatique d’oppression par un autre État constitue en soi l’impérialisme. S’opposer à l’impérialisme signifie donc s’opposer à la domination militaire d’un État bourgeois par un autre. Tous les États doivent vivre en harmonie les uns avec les autres ; ce n’est qu’alors que l’impérialisme cessera. « Marxistes » du XXIe siècle, ceci est tout simplement incroyable… mais « vrai » !
Ces groupes, figés dans la pensée du XIXe siècle d’avant la Première Guerre mondiale, imprégnés de l’opportunisme de la Deuxième Internationale, rallient les travailleurs derrière des slogans petits-bourgeois de défense nationale et de démocratie. En guise de justification, ils affirment soutenir les peuples et non les États, tout en identifiant dans les faits les intérêts du peuple à ceux de son État. Ils nient l’autonomie des travailleurs et insistent sur le fait qu’ils ont des intérêts convergents avec leurs bourgeoisies locales respectives, bref une excuse pour subordonner le mouvement ouvrier à la bourgeoisie attaquée au nom de l’État, ce que nous appelons le nationalisme. Tout cela est justifié par la conception vulgaire et erronée selon laquelle l’impérialisme est une politique militaire et économique des grands États imposée à d’autres États plus faibles. Pour reprendre les termes de Lénine, l’impérialisme est la superstructure du capitalisme. L’impérialisme est inhérent à la logique interne du capital et ne peut être éliminé sans le dépassement révolutionnaire même du capitalisme [et donc son renversement]. Les guerres sont faites pour le profit, pour une plus grande exploitation, pour la contre-révolution totale, pour la subsomption capitaliste totale de l’humanité. Une fois cette guerre terminée, elle est assurée de se répéter à un autre endroit, à un autre moment, et les mêmes slogans chauvins flotteront à nouveau dans les airs, cherchant à repousser la lutte des classes à plus tard afin que davantage de prolétaires puissent verser leur sang au nom de la petite nation piétinée par la grande nation. En proie au pragmatisme politique et à un manque chronique de confiance envers les travailleurs du monde entier, les « marxistes » font le travail de la bourgeoisie nationale à sa place, avec une conviction révolutionnaire totale ! Ils se persuadent avec ferveur que leurs slogans et leurs mobilisations profitent pleinement au mouvement réel et servent ses intérêts. Ce qu’une telle justification accomplit au contraire, c’est d’accroître la confusion et la fragmentation de la classe ouvrière, déjà fatiguée et démoralisée par des décennies de contre-révolution. Pour les défaitistes révolutionnaires, le désir de voir leur propre État vaincu ne signifie pas le désir de voir un autre État vainqueur ; tous les travailleurs doivent souhaiter la défaite de leur gouvernement dans la guerre, non seulement face à d’autres États, mais aussi dans leurs actions révolutionnaires en tant que classe organisée contre son propre État !
iii.
Les travailleurs du monde entier sont soumis à l’exploitation et à l’aliénation de leur existence sociale par le capital, où qu’ils se trouvent dans le monde, tant dans le passé que dans le temps présent. En tant que marxistes, indissociables de la lutte pour le communisme, nous ne nous distinguons de la classe ouvrière que sur deux points : (1) en soulignant et en mettant en exergue les intérêts communs de l’ensemble du prolétariat, indépendamment de sa nationalité ; et, par conséquent, (2) en représentant toujours et partout les intérêts du mouvement dans son ensemble. Nous insistons sur la position marxiste de toujours : seules l’organisation indépendante, la lutte et la fraternité des travailleurs internationaux peuvent mettre fin à la barbarie du capitalisme. Ainsi, seul l’internationalisme de la classe ouvrière peut mettre un terme à toutes les guerres impérialistes. Nous encourageons donc les travailleurs de toutes les nations à trahir leur État et d’ainsi proclamer leur indépendance de classe.
Les travailleurs ne doivent pas adhérer au « pragmatisme » politique des révolutionnaires petits-bourgeois qui favorise la collaboration de classe (que nous appelons simplement libéralisme) ; le camp de la classe ouvrière internationale est celui qui s’oppose à la fois aux deux blocs belligérants et au capitalisme mondial lui-même. Les opportunistes renoncent à la lutte des classes en temps de guerre : ils considèrent que la « contradiction principale » est celle de la concurrence militaire entre des États activement hostiles, ce qui implique l’unité de la bourgeoisie et du prolétariat dans une telle entreprise. La lutte nationale passe avant la lutte des classes. Ils pensent que la lutte des classes ne prime qu’en période de « paix relative » et ils ne se rendent pas compte qu’ils pensent selon les schémas obscurs construits par la bourgeoisie ; ils ne voient pas que, pour la bourgeoisie, le temps que dure la paix n’est qu’une préparation à la guerre prochaine ! Dépouillée de toute prétention et civilité bourgeoises, se mettant à nu dans sa vérité de classe, la classe ouvrière internationale n’est ni pacifiste ni neutre, mais explicitement hostile aux bourgeoisies du monde entier. La lutte des classes prime – en effet, la classe est la seule base de la lutte – même et surtout en temps de guerre. Ainsi donc se décline la ligne « anti-guerre » de la lutte des classes : nous, les travailleurs, déclarons la guerre au système capitaliste mondial !
iv.
Nous ne défendons pas l’Iran ni aucun autre État-nation bourgeois contre des agresseurs impérialistes, mais nous encourageons la division de la nation en deux camps qui s’affrontent dans une guerre civile, et nous prenons le parti du camp prolétarien contre son propre gouvernement ainsi que contre l’agresseur. La classe ouvrière en Iran, au même titre que les travailleurs militants et conscients des États-Unis et d’Israël, doit faire tout son possible pour fraterniser avec les travailleurs du Moyen-Orient et se mobiliser en tant que classe selon la ligne défaitiste révolutionnaire. Il ne peut y avoir de compromis sur cette question ; les travailleurs en Iran ne sont pas tenus de consacrer leur énergie à défendre l’État bourgeois islamique iranien et à le protéger contre la bourgeoisie des États-Unis, d’Israël et de l’Union européenne. Dans aucune révolte sérieuse d’esclaves, on ne verra les esclaves s’unir avec leurs propriétaires contre d’autres propriétaires d’esclaves.
De la guerre impérialiste à la guerre civile, et finalement à la confrontation ouverte dans la révolution mondiale : Non à la guerre sauf la guerre de classe ! Soutenons les travailleurs en Iran et au Moyen-Orient ! Menons campagne pour la fraternisation des travailleurs du monde entier ! Contre la barbarie capitaliste mondiale ! En avant, vers le socialisme !
Traduction française : Les Amis de la Guerre de Classe















































































































